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2 mai 2017 2 02 /05 /mai /2017 11:52

En Thaïlande, le mystérieux vol de la plaque de la révolution

Un article de Lina Sankari

Lien:

http://www.humanite.fr/en-thailande-le-mysterieux-vol-de-la-plaque-de-la-revolution-635457

À gauche, la plaque de bronze commémorant l’abolition de la monarchie absolue en 1932 et à droite la nouvelle plaque portant, elle, des inscriptions monarchistes

À gauche, la plaque de bronze commémorant l’abolition de la monarchie absolue en 1932 et à droite la nouvelle plaque portant, elle, des inscriptions monarchistes

Après la disparition d’une plaque commémorant le renversement de la monarchie absolue, le gouvernement militaire tente d’étouffer l’enquête. L’affaire suscite un appétit inédit pour l’histoire de ce coup d’Etat qui fit un premier pas en direction de la démocratie.

Qui a voulu effacer l’histoire? Plongée dans la dictature militaire depuis bientôt trois ans, la Thaïlande a visiblement du mal à reconnaître certains pans de son passé. Au début du mois, une plaque de bronze commémorant l’abolition de la monarchie absolue en 1932, fixée dans la chaussée, a été subtilisée à Dusit, dans le centre ancien de Bangkok. Elle a été échangée contre une plaque flambant neuve portant, elle, des inscriptions monarchistes. Sur la plaque volée, ces mots: «c’est ici, dans la matinée du 24 juin 1932 que le parti du peuple a donné naissance à la Constitution pour le progrès de la nation». Sur la nouvelle, un slogan exhortant à appuyer la monarchie et la religion bouddhiste. «Enlever cette plaque ne pourra effacer l’histoire», prévient Erich Parpart dans le Bangkok Post.

Quand le pays redécouvre la révolution

Cette découverte faite par des étudiants a bousculé les progressistes et démocrates du pays qui savent à quel point les conservateurs honnissent cette période de l’histoire durant laquelle, pendant quelques mois seulement, la personne du roi n’était plus «sacrée et inviolable» mais pava durablement la voie au parlementarisme. A tel point que l’actuel gouvernement militaire a mis du temps à réagir à la disparition de la plaque originelle. L’enquête se révèle par ailleurs des plus complexes. Et, comme un fait exprès, les caméras de surveillance placées aux abords de la place historique, avaient été retirées quelques jours auparavant. Après s’être réfugié un temps dans le déni, en refusant de répondre aux questions relatives à ce vol, les militaires ont ensuite fait arrêter tous ceux qui réclamaient une enquête et disperser les rassemblements. Les journaux eux-mêmes se voient interdire la possibilité de publier quelque article sur cette affaire. Face à ce silence, des groupes militants se sont piqués de mener l’enquête avant d’être appréhendés par la police massivement mobilisée sur le site pour éviter les démonstrations gênantes.

«Des promoteurs de la démocratie»

«Si le gouvernement militaire n’est pas responsable, pourquoi les autorités éludent les questions et ne fournissent aucune explication?», interroge en outre Erich Parpart. Ils sont pourtant nombreux à demander des comptes et, en premier lieu, les descendants de Khana Ratsadon (le parti du peuple) qui fut à l’origine du coup d’Etat de 1932. A 78, Maj Puttinart Paholpolpayuhasena, fils d’un acteur de la révolution, rappelle que son illustre ascendant et ses compagnons étaient «des promoteurs de la démocratie» contrairement aux protagonistes des dix-neuf coups d’Etats qu’a connu la Thaïlande depuis. Problème pour la junte qui, grâce à sa nouvelle constitution, a soumis le pouvoir politique à l’armée: personne n’a jamais autant parlé de 1932 et de sa révolution. Y compris des jeunes qui n’étaient d’évidence pas familiers de cette histoire.

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